Page 64 - Война и мир 1 том
P. 64
peut atteindre, il me parait assez inutile de s'occuper d'une lecture inintelligible, qui par la meme ne
pourrait etre d'aucun fruit. Je n'ai jamais pu comprendre la passion qu'ont certaines personnes de
s'embrouiller l'entendement, en s'attachant a des livres mystiques, qui n'elevent que des doutes dans
leurs esprits, exaltant leur imagination et leur donnent un caractere d'exageration tout-a-fait
contraire a la simplicite chretnne. Lisons les Apotres et l'Evangile. Ne cherchons pas a penetrer ce
que ceux-la renferment de mysterux, car, comment oserions-nous, miserables pecheurs que nous
sommes, pretendre a nous initier dans les secrets terribles et sacres de la Providence, tant que nous
portons cette depouille charienelle, qui eleve entre nous et l'Eterienel un voile impenetrable?
Borienons-nous donc a etudr les principes sublimes que notre divin Sauveur nous a laisse pour notre
conduite ici-bas; cherchons a nous y conformer et a les suivre, persuadons-nous que moins nous
donnons d'essor a notre faible esprit humain et plus il est agreable a Dieu, Qui rejette toute science
ne venant pas de Lui;que moins nous cherchons a approfondir ce qu'il Lui a plu de derober a notre
connaissance,et plutot II nous en accordera la decouverte par Son divin esprit.
«Mon pere ne m'a pas parle du pretendant, mais il m'a dit seulement qu'il a recu une lettre et
attendait une visite du prince Basile. Pour ce qui est du projet de Marieiage qui me regarde, je vous
dirai, chere et excellente amie, que le Marieiage, selon moi,est une institution divine a laquelle il
faut se conformer. Quelque penible que cela soit pour moi, si le Tout-Puissant m'impose jamais les
devoirs d'epouse et de mere, je tacherai de les remplir aussi fidelement que je le pourrai, sans
m'inquieter de l'examen de mes sentiments a l'egard de celui qu'il me donnera pour epoux. J'ai recu
une lettre de mon frere, qui m'annonce son arrivee a Лысые Горы avec sa femme. Ce sera une joie
de courte duree, puisqu'il nous quitte pour prendre part a cette malheureuse guerre, a laquelle nous
sommes entraines Dieu sait, comment et pourquoi. Non seulement chez vous au centre des affaires
et du monde on ne parle que de guerre, mais ici, au milieu de ces travaux champetres et de ce calme
de la nature, que les citadins se representent ordinairement a la campagne, les bruits de la guerre se
font entendre et sentir peniblement. Mon pere ne parle que Marieche et contreMarieche, choses
auxquelles je ne comprends rien; et avant-hier en faisant ma promenade habituelle dans la rue du
village, je fus temoin d'une scene dechirante… C'etait un convoi des recrues enroles chez nous et
expedies pour l'armee… Il fallait voir l'etat dans lequel se trouvant les meres, les femmes, les
enfants des hommes qui partaient et entendre les sanglots des uns et des autres!
On dirait que l'humanite a oublie les lois de son divin Sauveur, Qui prechait l'amour et le
pardon des offenses, et qu'elle fait consister son plus grand merite dans l'art de s'entretuer.
«Adieu, chere et bonne amie, que notre divin Sauveur et Sa tres Sainte Mere vous aient en
Leur sainte et puissante garde. Marieie».
[ Милый и бесценный друг. Ваше письмо от 13-го доставило мне большую радость.
Вы всё еще меня любите, моя поэтическая Юлия. Разлука, о которой вы говорите так много
дурного, видно, не имела на вас своего обычного влияния. Вы жалуетесь на разлуку, что же я
должна была бы сказать, если бы смела, – я, лишенная всех тех, кто мне дорог? Ах, ежели бы
не было у нас религии для утешения, жизнь была бы очень печальна. Почему приписываете
вы мне строгий взгляд, когда говорите о вашей склонности к молодому человеку? В этом
отношении я строга только к себе. Я понимаю эти чувства у других, и если не могу одобрять
их, никогда не испытавши, то и не осуждаю их. Мне кажется только, что христианская
любовь, любовь к ближнему, любовь к врагам, достойнее, слаще и лучше, чем те чувства,
которые могут внушить прекрасные глаза молодого человека молодой девушке, поэтической
и любящей, как вы.
Известие о смерти графа Безухова дошло до нас прежде вашего письма, и мой отец был
очень тронут им. Он говорит, что это был предпоследний представитель великого века, и что
теперь черед за ним, но что он сделает все, зависящее от него, чтобы черед этот пришел как
можно позже. Избави нас Боже от этого несчастия.
Я не могу разделять вашего мнения о Пьере, которого знала еще ребенком. Мне
казалось, что у него было всегда прекрасное сердце, а это то качество, которое я более всего
ценю в людях. Что касается до его наследства и до роли, которую играл в этом князь
Василий, то это очень печально для обоих. Ах, милый друг, слова нашего Божественного